Le divorce entre un ressortissant français et un ressortissant marocain soulève de nombreuses questions juridiques en raison de la diversité des législations applicables, notamment celles du Maroc et de la France. Si les deux époux souhaitent opter pour un divorce à l’amiable, il est important de noter que les procédures diffèrent considérablement d’un pays à l’autre, rendant parfois certaines formes de divorce inapplicables.
Cet article explore les enjeux du divorce entre un Français et un Marocain, les options disponibles, et la compétence des tribunaux français pour trancher sur les différents aspects du divorce.
Divorce amiable par acte d’avocats : une procédure non reconnue par le Maroc
En France, il est possible de procéder à un divorce amiable par acte sous signature privée contresigné par avocats, c’est-à-dire un divorce sans passage devant un juge. Cette procédure, souvent plus rapide et moins coûteuse, permet aux époux de s’accorder sur toutes les modalités du divorce (résidence des enfants, pension alimentaire, répartition des biens, etc.).
Cependant, cette forme de divorce n’est pas reconnue par la législation marocaine. En effet, selon le droit marocain, seul un divorce judiciaire peut être transcrit sur les registres d’état civil marocains. Un divorce par acte d’avocats en France ne pourrait donc pas être transcrit sur les actes d’état civil marocain, ce qui poserait difficulté si l’un des époux souhaite voir le divorce reconnu dans les deux pays d’une part. D’autre part, la convention de divorce n’aurait pas de force obligatoire et ne serait pas applicable contre l’époux marocain.
Divorce judiciaire sur requête conjointe : la solution pour un divorce amiable
Pour qu’un divorce à l’amiable soit reconnu par le Maroc, la seule solution possible est le divorce judiciaire sur requête conjointe. Cette procédure implique que les deux époux déposent une demande commune devant un tribunal français, avec l’assistance de leurs avocats respectifs, pour faire constater leur accord sur les modalités du divorce.
Si les deux parties parviennent à un accord sur les conditions du divorce (résidence des enfants, pension alimentaire, prestation compensatoire, partage des biens), le juge aux affaires familiales peut prononcer le divorce. Ce type de divorce, ayant fait l’objet d’une décision judiciaire, sera en principe reconnu par le Maroc et pourra être transcrit sur les registres d’état civil marocain.
En cas de désaccord : l’assignation en divorce
Si l’un des époux refuse de coopérer ou n’engage aucune démarche auprès d’un avocat, l’autre époux n’aura pas d’autre choix que de recourir à une assignation en divorce, qu’il s’agisse d’un divorce pour altération définitive du lien conjugal, pour faute, ou pour acceptation du principe de la rupture du mariage.
Dans cette hypothèse, un jugement sera rendu par le tribunal, mais les conséquences pourront varier en fonction du pays de résidence de l’époux marocain et de la compétence des juridictions.
Compétence des tribunaux français et loi applicable
Une convention bilatérale a été signée entre la République française et le Royaume du Maroc, relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire (décret n° 83-435 du 27 mai 1983 publié au JO du 1er juin 1983, page 1643).
https://www.diplomatie.gouv.fr/IMG/pdf/Convention_Maroc.pdf
Élément d’extranéité
Pour déterminer si les tribunaux français sont compétents pour prononcer un divorce entre un Français et un Marocain, statuer sur les mesures relatives aux enfants, aux obligations alimentaires ainsi que les questions liées au régime matrimonial, il est nécessaire de lister et vérifier les critères d’extranéité :
- nationalité des époux,
- lieu du mariage,
- lieu du domicile commun ou du dernier domicile…
Compétence des tribunaux français
En matière de divorce international, la compétence des tribunaux français peut être retenue si :
- L’un des époux réside habituellement en France ;
- Le couple a sa résidence habituelle en France ou avait sa dernière résidence en France ;
- Le demandeur est français.
Loi applicable au divorce
La loi applicable au divorce dépend généralement de plusieurs facteurs, notamment la résidence des époux et leur nationalité. En France, le règlement européen Bruxelles II bis et les conventions internationales encadrent ces questions. Ainsi, le tribunal français peut être compétent pour prononcer le divorce mais selon la loi marocaine. Pour un couple franco-marocain, trois scénarii sont possibles :
- Résidence en France : Si les époux résident en France, le droit français s’appliquera généralement au divorce, même si l’un des époux est de nationalité marocaine.
- Résidence au Maroc : Si les époux résident au Maroc, le droit marocain pourrait être applicable, sauf disposition contraire.
- Résidence dans deux pays différents : Dans ce cas, la loi du pays de résidence de chacun des époux pourrait entrer en conflit. Les tribunaux français appliqueront généralement le droit français pour régler le divorce d’un Français.
Les enfants et obligations alimentaires
Résidence des enfants et droit de visite
La loi française prévoit que les modalités relatives à la résidence des enfants doivent être fixées dans l’intérêt de ces derniers. Le juge tiendra compte des conditions de vie des parents, de la stabilité de l’environnement des enfants, ainsi que de leur relation avec chacun des parents.
Pension alimentaire et obligations entre époux
Les obligations alimentaires entre les époux (pension alimentaire) et envers les enfants relèvent des articles 371-2 et suivants du Code civil français. En matière de divorce international, le juge compétent en France peut décider du montant de la pension alimentaire en fonction des ressources et besoins des parties.
Le régime matrimonial
Concernant le régime matrimonial, la loi applicable peut varier en fonction de la date de mariage et du lieu où celui-ci a été célébré. En général, si les époux n’ont pas signé de contrat de mariage, le régime matrimonial légal applicable sera celui de la première résidence habituelle des époux après le mariage. Si les époux se sont mariés au Maroc, le régime de la séparation des biens pourrait s’appliquer, sauf s’ils ont opté pour un autre régime par contrat.
Pour un exemple d’un couple marocain, marié au Maroc et qui vit en France :
- Prononcé du divorce : compétence des tribunaux français et Marocain et loi applicable marocaine (application de la Moudawana).
- Obligations alimentaires : compétence des tribunaux français et loi applicable française.
Conclusion
Le divorce entre un Français et un Marocain, bien que possible, requiert une attention particulière aux questions de compétence des tribunaux et de reconnaissance mutuelle des décisions de justice. Un divorce amiable est envisageable uniquement par voie judiciaire, tandis qu’en cas de désaccord, une assignation en divorce est nécessaire. Enfin, la gestion des obligations alimentaires et des droits parentaux nécessite également une analyse attentive, tenant compte des législations françaises et marocaines. Il est conseillé aux époux de se faire accompagner par des avocats spécialisés en droit international pour assurer une procédure fluide et reconnue dans les deux pays.
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